Hémiplégies
L’hémiplégie est la paralysie partielle ou complète de la moitié du corps. Elle est la conséquence d’un accident vasculaire cérébral (A.V.C) Les séquelles de l’A.V.C sont diverses et varient selon la localisation et l’étendue de la lésion.
L’éducation de la personne hémiplégique passe très souvent par l’éducation de la famille et des proches, voire même par l’éducation des soignants encore trop peu formés aux questions de neurologie.
Causé par embolie, thrombose, tumeur ou hémorragie cérébrale, l’accident vasculaire cérébral se manifeste toujours de façon brutale. On comprend volontiers son appellation ancienne et persistante ; » attaque « .
La gravité de l’hémiplégie et des troubles associés tels qu’aphasie, héminégligence, apraxie, agnosie, troubles de la sensibilité, difficultés de concentration et de mémorisation, variera selon la localisation et l’étendue de la lésion. Article présenté en 1996 par Monique De Plaen et Thierry Carière.
Des études menées en France et citées par J. Pelissier (1998) indiquent l’A.V.C. comme la troisième cause de décès. Parmi les survivants, une personne sur dix n’a aucune séquelle, quatre personnes sur dix souffrent de séquelles légères et quatre personnes sur dix gardent des déficits graves. Une personne sur dix doit être maintenue en institution.
Avant de poursuivre, interrogeons-nous un instant sur les tranches d’âge concernées par l’hémiplégie.
Toujours selon les études françaises (J.Pelissier,1998), le nombre de nouveaux cas par an est de 0,6 à 1,8 pour mille habitants. Entre 45 et 54 ans, la valeur moyenne est de 1 pour 1000. Ce chiffre augmente avec l’âge pour atteindre une valeur de 40 pour mille après 85 ans. D’emblée, nous voyons que l’âge est un facteur favorisant, mais que l’A.V.C. survient également chez des personnes jeunes ; le phénomène ne peut donc être lié exclusivement à l’âge.
Soulignons ce point d’importance : l’individu jeune atteint d’hémiplégie ne doit pas, outre la fracture de son projet de vie, être précipité dans le domaine de la gériatrie !
Nous axerons donc la suite de notre propos sur une perspective double :
- La gestion » d’une courbe de vie descendante » avec tous les problèmes physiques et psychologiques de personnes âgées.
- La gestion d’un projet de » milieu de courbe de vie » chez les individus jeunes.
L’hémiplégie : derrière l’accident, l’individu.
Pour l’individu brutalement privé de l’usage d’un hémicorps qui échappe à sa sensibilité et à son contrôle, c’est l’entrée soudaine dans le domaine de la dépendance.
Dans les jours qui suivent l’A.V.C., l’individu est incapable, seul, , de se mouvoir, de se lever, s’asseoir, s’habiller,… Non seulement il en est incapable, mais l’absence fréquente de sensibilité de l’hémicorps crée un sentiment d’étrangeté par rapport aux soins et manipulations pratiqués par les soignants.
Très tôt après l’A.V.C., différentes techniques de rééducation sont mises en place : kinésithérapie, logopédie, ergothérapie, neuropsychologie.
Trop souvent négligée, la façon de procéder au transfert et au positionnement du patient lors des soins infirmiers est d’une importance capitale.
Fréquents en neurologie, mais peu connus et peu compris par le public, c’est-à-dire par la famille, les proches et parfois le personnel hospitalier, les troubles neuropsychologiques (troubles de concentration, de mémorisation, de compréhension et d’expression) peuvent compliquer la situation du malade et perturber sa collaboration au processus de réadaptation. Parfois mal avertis, les proches font appel à la volonté du patient, bien incapable de contrôler ces troubles, et ne font qu’accroître la dépression.
Le patient âgé.
Le patient âgé atteint d’hémiplégie vit le handicap comme une détérioration qui s’ajoute encore à celle entamée par l’âge. Sa combativité est réduite, souvent il s’installe dans la passivité. Entamer une rééducation lui paraît au-dessus de ses forces, et il faudra attendre les premiers progrès pour lui redonner confiance. L’avenir l’inquiète, car le conjoint, souvent âgé lui-même, n’est pas toujours à même de faire face au handicap.
Même s’il n’a plus à assumer de tâches professionnelles et de responsabilités familiales, la perspective d’un retour en famille est d’emblée parsemée d’embûches. Le rôle social se réduit encore et l’isolement menace.
Le patient hémiplégique âgé est souvent moins apte à modifier des habitudes de vie et à s’adapter à des situations nouvelles. Tout l’entourage devra donc veiller à l’acceptation de diverses nouveautés, ainsi qu’à maintenir dans la maison même, une vie sociale et stimulante.
N’oublions pas dans nos propos le patient isolé. Pour lui, le retour à domicile après une hospitalisation de longue durée, n’est pas toujours réalisable. Un bon test préalable à une prise de décision, peut consister, durant le séjour à l’hôpital, en un retour à domicile les week-ends, avec une réévaluation des difficultés sur base de situations concrètes.
Agé, jeune, entouré par sa famille ou isolé, le patient hémiplégique à domicile a besoin de visites régulières du médecin généraliste. Celui-ci est parfois le seul à pouvoir apprécier la situation de l’individu tant au niveau de son état de santé physique qu’au niveau psychologique et dans les tâches quotidienne.
Nous souhaitons que la consultation à domicile du médecin de famille consiste en une approche globale et attentive de la situation de l’hémiplégique, avec une connaissance préalable des techniques de rééducation mises en place au niveau hospitalier et adaptées au domicile.
Lorsque l’on considère les handicaps résiduels et que l’on envisage le réaménagement de la vie quotidienne de la personne hémiplégique, il n’est pas rare de se trouver davantage devant une problématique de société (soins à domicile, aides à la vie quotidienne, aides techniques, institutions ou centres de jour adaptés, moyens de transport adaptés,…) plutôt que devant une problématique familiale.
Notons que certains ergothérapeutes hospitaliers se rendent au domicile de leur patient et proposent des aménagements.
Le patient jeune.
Le patient jeune, quant à lui, voit ses projets et son style de vie se fracturer brutalement.
Le constat est vite fait : le handicap est là, plus ou moins important.
L’acceptation, quant à elle, sera un processus plus long, un cheminement difficile, la réaction dépressive peut être importante.
Par contre, la participation aux soins sera bien souvent excellente, le patient ayant hâte de quitter l’hôpital de rééducation, et de rejoindre son domicile.
Mais à ce stade, c’est une deuxième épreuve parfois sous-estimée qui l’attend : il faut retrouver sa voie dans les pièges de la vie quotidienne, sans le support hospitalier.
Ce qui semblait précédemment si facile, comme le fait de descendre deux marches sans rampe, ou de porter un colis et devoir ouvrir une porte, devient une tâche complexe et requiert de l’énergie.
Avec un bon support familial, l’hémiplégique jeune, tout comme le moins jeune, tentera de mettre l’imagination au pouvoir, pour maintenir un maximum d’activités et renoncer le moins possible.
L’un trouvera le truc du tabouret à roulettes pour poursuivre des activités de ménage ou de bricolage au sol, l’autre descendra résolument l’escalier à l’envers lorsque la rampe se situe d’un seul côté : le bon pour monter, le mauvais pour descendre !
L’image de soi est entamée, la vie conjugale subit des perturbations au sein de son intimité. Il s’agit pourtant de vivre, et faire encore des projets en apprivoisant de nouvelles limites et un nouveau regard de la part d’autrui.
Pour la famille et les proches, le processus d’adaptation n’est pas négligeable.
Eux aussi auront besoin de support, afin que le système familial puisse continuer de fonctionner avec une adaptation des différents rouages.
Éducation du patient.
Dans le cadre de l’hémiplégie, parler d’éducation du patient à sa maladie est totalement inadéquat si l’on n’ajoute pas la notion d’éducation de la famille et des proches, voire même celle des soignants encore trop peu formés aux questions de neurologie.
En effet, pendant un délai plus ou moins long, le patient peut méconnaître certains de ses troubles et sa sensibilité peut être altérée. C’est donc, avant tout, l’intervention adéquate des proches ou soignants, notamment en matière de transfert, de positionnement et de réaction, qui va favoriser la récupération des fonctions. Tout ceci nécessite un véritable travail pluridisciplinaire d’information sur les techniques de rééducation d’une part, et de collaboration entre les intervenants, d’autre part.
Dans ce contexte, il est essentiel que l’hémiplégique soit considéré comme un partenaire et non simplement comme un » patient « , avec toute la notion que ce terme peut impliquer.